Immobilier neuf, une crise sans précédent qui dure

L’immobilier neuf est presque à l’arrêt depuis septembre 2022 période où l’impact de la hausse des taux de crédit et des couts de construction à stopper les acquéreurs.
La rentabilité n’est plus au rdv pour les investisseurs, encore moins avec la baisse des avantages fiscaux en 2024 et encore moins pour les primo accédants qui ont toutes les difficultés pour trouver des financements.
Dans un contexte économique où l’inflation sur les charges quotidiennes pèse de plus en plus : courses, électricité, entretien….les français n’achètent et ne vendent plus leur bien.
Tous les secteurs sont touchés : l’ancien : vendre moins cher que prévu c’est avoir une incertitude sur le rachat, changer de bien locatif en sachant que les loyers augmentent limite les envies, les prix du neuf continuent d’augmenter en dehors des promotions ponctuelles. Les gens ne déménagent donc plus, ils ne consomment plus pour leur nouvelle habitation : bricolage, décoration….et c’est tout un secteur d’activité qui souffre.

immobilier en crise

l’immobilier neuf est en crise de l’offre


Plus particulièrement dans le neuf, la fin d’année 2022 n’a pas été citée comme étant compliquée. En effet, les actes d’achats sont passées en moyenne 4 à 8 mois après la réservation, le dernier trimestre 2022 a donc été bon en acte mais pas en réservation…c’était le début de la crise.

En 2023, la baisse des réservations semblait « limitée » mais c’était sans compter sur les ventes en masse et/ou en bloc de logements à prix cassés aux organismes sociaux.
Dans certains programmes/quartiers, ce sont plus de 80% des logements qui ont été réservés par les fonds d’aides et d’achats de logements sociaux et intermédiaires. Ces achats ont été réalisés pour éviter la fermeture pure et simple de promoteurs qui auraient eu leurs fonds propres bloqués et des difficultés majeures de financement et refinancement.
Cette approche est bonne pour limiter la « casse » mais ne fonctionne pas dans la durée car les promoteurs qui vendent à prix cassé ne peuvent pas soutenir le marché et réaliser des programmes entiers sans un minimum de rentabilité.

Désormais il ne reste donc plus que la possibilité d’un redémarrage pour leur permettre de survivre. On le constate avec les petits qui pour beaucoup ont déjà fermés. Les plus gros promoteurs, plus « adaptables » avec des services recherches, des opportunités de diversification dans le bureau, dans les rénovations de grandes surfaces…arrivent à sauver quelques mois de Chiffre d’affaires mais les derniers plans sociaux : Bouygues, Vinci, Nexity, montre l’ampleur des dégâts. Nexity a même été contraint de vendre sa « pépite » financière : l’ADM (Administration de Bien) qui lui rapportait un revenu récurrent et une valorisation financière durable en alimentant le système grâce aux livraisons de logements que ses filiales géraient, revendaient….

Rappelons qu’il y a quelques années, Nexity avait pour vocation de devenir le promoteur qui intervient dans l’ensemble des besoins immobiliers de la vie d’un français : location, achat, investissement, gestion, syndic, transaction, résidences étudiantes, résidences séniors, résidences meublées….
Mais quel est le problème majeur de la promotion et du logement neuf ?
Il y en a plusieurs.

Tout commence peut-être par la commercialisation.
En effet, depuis 1985 s’enchaînent des lois fiscales permettant à un investisseur de bénéficier d’un avantage fiscal en contrepartie de sa participation à la construction d’un ou plusieurs logements et de le mettre en location pendant une durée déterminée et dans des plafonds de loyer et ressource du futur locataire.
Le but de départ est « noble » : favoriser la construction en France, en récupérer les « fruits » : TVA 20%, charges sur la transaction du terrain, sur les matériaux, sur les salaires des entreprises et collaborateurs qui participent à la construction, charges sur la gestion locative si le bien est confié à un professionnel….et surtout, permettre aux gens de se loger et permettre aux investisseurs d’avoir une optique retraite plus souple afin de favoriser des retraités plus aisés donc moins « aidés », moins dépendants.
Finalement quel est le problème ? l’état donne par exemple actuellement un avantage Pinel entre 12 et 18% du montant de l’investissement et récupère tout de suite 20% de TVA donc le gain est immédiat !
Revenons à la commercialisation d’un programme neuf. Il y a en gros 4 potentiels acquéreurs.

Le premier : l’organisme social car dans tous les programmes (sauf exception) il y a un quota de logements sociaux à respecter : 25/30/40/50%. Parfois, désormais souvent, suivant la taille des opérations, il convient d’ajouter une part de logements dits intermédiaires.

Le second : l’investisseur car ils se décident sur plan
Ces deux « acquéreurs » sont les plus importants car ils permettent au promoteur d’obtenir son « quota de ventes » c’est-à-dire de vendre 50 à 60% du programme afin d’obtenir la Garantie Financière d’Achèvement (GFA) délivrée par un organisme financier se portant garant de l’opération. Sans ce quota, le promoteur ne peut pas lancer les travaux, ne peux pas passer les actes et encaisser des fonds, il ne peut tout simplement pas réaliser l’opération.

Ensuite il y a le troisième acquéreur : le primo accédant qui achète pour habiter, il a majoritairement un potentiel d’achat limité, il a surtout besoin de se projeter et a du mal à réserver un logement neuf sur plan sans savoir précisément où se trouvera son logement, son balcon, la taille de ses pièces et notamment du séjour…les vis-à-vis.

Enfin le quatrième acquéreur : l’acquéreur en résidence secondaire ou les personnes âgées qui souhaitent acheter un appartement en lieu et place de leur maison pour s’exonérer de l’entretien. Ces personnes sont souvent plus exigeantes que la moyenne dans leurs critères de recherche : logement de taille plus grande, belle terrasse, peu de vis-à-vis …

On comprend vite que le 3e acquéreurs existe en nombre limité pour l’achat d’un logement neuf et le 4e se confronte à une dure réalité : plus les logements sont grands en m2 par typologie, moins le m2 est cher. Donc le promoteur étant dans une équation de rentabilité dès l’achat du terrain, sinon un confrère l’achète à sa place, les logements sont réfléchis dès le départ, compacts et, encore une fois sauf exception, ils ne correspondent pas à l’acquéreur 4 qui, parfois aussi comme l’acquéreur 3 a besoin de temps pour se projeter.

Après ce constat, on comprend que dans le marché actuel, étant donné que l’état ne souhaite pas proroger d’avantage fiscal sur l’investissement dans les logements collectifs neufs, les acquéreurs 2 : les investisseurs, qui permettaient d’avoir la GFA, investissent de moins en moins.

L’acquéreur 1 : social, présentant une rentabilité négative, il ne peut pas être le seul à permettre l’obtention de la GFA car l’organisme financier ne cautionne pas d’opération à perte….
Aujourd’hui donc, l’équation ne fonctionne plus, ne serait que sur la commercialisation et la rentabilité d’une opération.
Le 2e problème majeur : le cout de construction. Une baisse drastique des prix permettrait de redonner envie aux investisseurs et solvabiliserait des primo accédants peut-être un peu plus tôt dans la démarche d’achat.
Mais ce cout continu d’augmenter. Que ce soit par rapport aux matériaux, à la main d’œuvre, aux fonciers.

Le 3e problème majeur : les normes qui augmentent elles aussi le cout de construction. Les dernières obligations en terme de chauffage, de décarbonisation, de norme électrique, accès handicapé, isolation, locaux deux roues, pourcentage de descente de la rampe d’accès au sous-sol, l’obligation zéro artificialisation nette des sols, conservation des espaces pleine terre, coefficient de biotope, études phytosanitaires pour la protection des végétaux, des arbres…

En conclusion, le système de promotion en France ne fonctionne tout simplement plus. L’état ne peut pas financier seul et de manière rentable pour les opérateurs, des programmes neufs suffisants. Les promoteurs n’arrivent pas à faire baisser les prix. Les acquéreurs ne sont plus au rendez-vous. Le problème à venir, après la fermeture massive des commerciaux qui vendent du neuf, des agences immobilières, de certains promoteurs, ce sont les artisans du bâtiment, dans les prochains mois, qui vont rentrer dans cette crise.

On parle déjà d’un nombre de défaillances sans précédent. Les plus grands perdants seront les Français, par la perte des recettes fiscales de ces activités, mais surtout les futurs locataires car la demande est très largement supérieure à l’offre, donc les loyers explosent, les baux précaires se multiplient et de nombreuses personnes n’arrivent plus à se loger dignement sans aucun espoir d’être un jour propriétaire.

L’immobilier en France ce n’est pas une bulle spéculative, c’est un besoin, pour protéger sa famille, son patrimoine, sa retraite et son avenir…